sábado, 2 de enero de 2016

El niño, la literatura, y la filosofía


L'ENFANT, LA LITTERATURE ET LA PHILOSOPHIE
Edwige Chirouter1 Université de Nantes, Chaire UNESCO, France

No hay edad para hacer preguntas filosóficas y, muy pronto, frente al asombro ante el mundo, los niños se preguntan acerca de la vida, la muerte y las relaciones humanas. El niño es por excelencia, en palabras de Deleuze, el "idiota" que plantea la cuestión del por qué y de la esencia de las cosas, con ingenuidad e intensidad. La práctica de "filosofía con los niños" ha sido desarrollado en Europa durante los últimos veinte años. Esta práctica cumple con la necesidad de democratización de una disciplina considerada demasiado a menudo como hermética y elitista. Al mismo tiempo, la literatura juvenil parece haber considerado estas cuestiones metafísicas. Los programas de literatura en las escuelas primarias también hacen hincapié en esta dimensión de las obras e promueven debates reflexivos. Es en esta brecha que quienes desean una introducción temprana a la filosofía se han precipitado a establecer sesiones en el aula. El mundo de los niños de hoy podría por lo tanto ser el puente para conciliar dos disciplinas cuya historia está escrita, desde hace demasiado tiempo, bajo los signos de la competencia y desconfianza mutuas. Así, podrían recuperar su alianza original, más allá de las formas específicas que tienen con el lenguaje, ambas son discursos que tratan de dar sentido e inteligibilidad a nuestra existencia. Disciplinas en conflicto hace demasiado tiempo, la literatura y la filosofía, ¿no podrían encontrar una nueva complementariedad mediante el desarrollo conjunto de su didáctica con niños?
Palabras clave: filosofía, estudios literarios, enfoque interdisciplinario, didáctica, currículo

L'ENFANT, LA LITTERATURE ET LA PHILOSOPHIE

Introduction
La pratique de la « philosophie avec les enfants » se développe en France depuis maintenant une trentaine d’année. Venues des États-Unis, suite aux travaux et expérimentations du philosophe M. Lipman, les « DVP »2 prennent des formes diverses, répondent à des enjeux pluriels et suscitent de nombreuses controverses. En quoi ces pratiques avec de si jeunes élèves peuvent-elles être véritablement philosophiques ? Quels dispositifs ? Quels supports ? Quelles exigences ? Quelle formation pour les enseignants ? Le présent article restitue ainsi les conclusions principales d’une recherche menées sur 3 années consécutives sur la philosophie avec les enfants et la portée philosophique de la littérature de jeunesse.3 Cette recherche partait de l’hypothèse suivante: on ne peut apprendre à philosopher sans supports, sans textes, qui permettent la mise à distance et la problématisation du sujet. Les textes de philosophie classiques étant trop ardus et complexes pour des élèves du primaire, c’est grâce à la littérature que l’on peut leur permettre d’entrer dans la réflexivité. Et c’est d’ailleurs peut-être grâce à l’enfance que la littérature et la philosophie pourraient retrouver leur alliance originelle. L’enfance est le pont qui permettrait de retrouver la fraternité de ces deux paroles, qu’il ne faut certes pas confondre, mais dont il ne faut surtout pas oublier non plus le fondement commun : la littérature et la philosophie sont toutes les deux des discours qui donnent sens et intelligibilité à notre existence. Elles naissent de l’étonnement devant le monde, expérience fondatrice dont l’enfance nous rappelle chaque jour la force, et cherchent toutes les deux à éclairer notre condition. Disciplines trop souvent et injustement cloisonnées dans les systèmes éducatifs, la littérature et la philosophie ne pourraient-elles pas retrouver leur complémentarité grâce au développement de la philosophie avec les enfants?
D’un point de vue méthodologique, nous avons suivi pendant trois années les mêmes élèves, à raison d’une séance d’atelier philosophique par semaine, séances menées par un professeur de philosophie (moi-même) et toujours suivant le même dispositif de lecture en réseau d’albums sur les questions philosophiques traitées. Toutes les séances ont été filmées, retranscrites et analysées selon une grille d’analyse qui a permis de mesurer à la fois le développement des compétences spécifiquement philosophiques de ces élèves (argumenter, conceptualiser, problématiser) et surtout de montrer en quoi la littérature permettait à de très jeunes élèves d’entamer cet apprentissage complexe. L’analyse de ce corpus a ainsi démontré que des élèves entre 8 et 11 ans sont capables, si le dispositif et l’étayage de l’enseignant le permettent, de construire une lecture spécifiquement philosophique. Les élèves de l'école primaire sont donc bien


2 « Discussion à visée philosophique », expression communément utilisée pour désigner les pratiques de la philosophie avec les enfants.
3 CHIROUTER Edwige. (2008). « A quoi pense la littérature de jeunesse ? Portée philosophique de la
littérature et pratiques à visée philosophique au cycle 3 de l’école élémentaire ». Doctorat Sciences de l’éducation. Direction de M. TOZZI. U. Montpellier IIII. 485 p.
capables de saisir la pensée d’un récit pour construire leur propre réflexion sur un concept (comme le Bonheur, la Liberté, l’Amour, l’Amitié).

L’alliance profonde de l’enfance, de la littérature et la philosophie
Parce que l’enfance fonctionne intimement selon les modalités de la pensée magique, elle est l’âge d’or de cette capacité proprement humaine à s’immerger corps et âme dans l’univers fictionnel. Ce génie de l’abandon dans l’imaginaire se retrouve aussi dans les jeux d’imitation et de rôle. C’est ce charme de la fiction qui a d’ailleurs pu être aussi la cible des philosophes (comme Platon ou Rousseau). Son pouvoir de séduction et d’emprise est tel qu’elle peut s’avérer une illusion dangereuse qui flatte les passions et les pulsions. « Ce consentement euphorique à la fiction »4, parce qu’il est constitutif de notre condition humaine, ne s’évanouit jamais complètement. Nous le retrouvons, presque intact, à chaque fois que nous (re)faisons l’expérience initiatique de la rencontre littéraire, à chaque fois que nous sommes pris dans et par un récit. A chaque lecture intense, c’est l’enfant en nous qui se réveille. Comme l’écrit magnifiquement Vincent Jouve, « la lecture est d’abord une revanche de l’enfance. »5
L’enfance, la littérature et la philosophie se rejoignent alors dans le même souci de saisir, de comprendre et de connaître. Car cette plongée de l’être dans les mondes de la fiction ne répond pas seulement à un désir d’échapper à la réalité. Bien au contraire, comme les adultes, l’enfant cherche aussi dans les histoires des réponses à ses interrogations fondamentales. Il s’évade et s’abandonne dans l’espoir sérieux d’y trouver du sens. La lecture est une quête à la recherche de soi et des autres. En réhabilitant la valeur pédagogique et réflexive des fables, genre pourtant souvent assimilé au moralisme édifiant, M. Fabre résume clairement cette dimension heuristique de la littérature: « Par le travail sur soi qu’elle exige :
distanciation, remaniement des identifications, dépassement de l’égocentrisme ; par la confrontation souvent polémique entre valeurs du lecteur et valeurs du texte ; par la distinction difficile entre lecture et critique, la compréhension est un processus mettant en jeu la personnalité totale. Comprendre le texte c’est en même temps tâcher, à travers lui, de se comprendre. »6
La philosophie et la littérature nous offrent des pensées vivantes sur les enjeux de la condition humaine et les valeurs de la culture. Elles extériorisent et mettent en question les représentations que nous avons de nous-mêmes et du monde. Comme l’a souligné P. Ricœur dans son œuvre, tout comme le discours philosophique, plus conceptuel et rationnel, le récit aussi nous permet d’interroger et de penser7. Et pour l’enfant, dont la capacité d’abstraction est en cours d’élaboration, les histoires jouent un rôle de médiation nécessaire qui donne forme à des problématiques éthiques ou existentielles. Elles permettent aussi d’expérimenter des mondes possibles. Elles instaurent ainsi les problématiques

4 JOUVE Vincent. (1993). La lecture. Paris : Hachette, (coll. « Contours littéraires »), p. 86
5 JOUVE Vincent. (1993). La lecture. Op.cit., p. 87
6 FABRE Michel. (1989). L’enfant et les fables. Paris : PUF, (coll. « Pédagogie d’aujourd’hui »), p. 234
7 RICOEUR Paul (1975). La métaphore vive. Paris : Seuil
dans une « bonne distance » par rapport au réel et offrent par là un accès royal à des réflexions d’ordre philosophique.
Il n’y a pas de véritable œuvre littéraire qui ne soit aussi une pensée sur le monde et l’existence. Comme l’écrit J. Crinon : « La littérature nous parle de nous- mêmes, de nos semblables, du monde qui nous entoure. En parlant du monde, elle l’organise en catégories implicites et c’est sans doute une de ses fonctions essentielles.»8 Ainsi dès l’école primaire, le travail sur cette dimension fondamentale des œuvres peut amorcer, dans le même temps, un apprentissage de la pensée philosophique. Il y a bien une conjonction nécessaire entre les deux disciplines. Ce n’est certes pas formulé de façon aussi explicite dans les programmes, mais pour éviter l’approche techniciste l’enseignement de la littérature doit retrouver la raison d’être même des récits : pourquoi y a-t-il de la littérature ? Parce que les hommes ont besoin de dire le monde et de le penser. Pourquoi avons-nous besoin de nous raconter des histoires ? Pour donner forme et sens aux mystères du monde, à son « inquiétante étrangeté ». La littérature a la même raison d’être que la philosophie : dire,
configurer, comprendre, éclairer.
Dans l’analyse des scripts de séances de discussions à visée philosophique menées avec des élèves de cycle 3, nous avons observé à l’œuvre cette complémentarité. Dans leurs interactions, les différentes communautés de recherche enfantine ont donné vie à cette alliance fondamentale de la littérature et de la philosophie : la réflexion sur l’implicite des textes a ouvert la voie à des réflexions de type philosophique sur les enjeux et la pensée dont ils sont porteurs. Nous avons ainsi montré la difficulté d’établir de strictes frontières entre le débat dit « interprétatif » et le débat dit « réflexif ». C’est bien essentiellement en explorant la littérarité des œuvres, en fouillant et creusant leur complexité, leurs
« blancs » et leurs mystères, que la réflexion philosophique a pu s’éveiller et
gagner en rigueur et en profondeur.
Il y a deux façons, un peu différentes, où l’on voit comment l’interprétation du texte littéraire amène à une discussion d’ordre philosophique :
- Soit l’interprétation provoque de fait une réflexion générale. Pour l’album Dans les yeux d’Henriette de Virginie Jamin par exemple 9 : une des interprétations possibles de la « disparition » d’Henriette est sa mort (non explicite dans la lettre du texte mais symbolisée). Or, son ami Armand n’est pas triste, il est même « content » à la fin de l’album (là, c’est un élément objectif, explicite, dans le texte et qui est de


8 CRINON Jacques. (2008) « Une première culture littéraire ». Cahiers pédagogiques. n°462, p. 32-33 [numéro : La littérature de jeunesse, une nouvelle discipline scolaire ?]
9 JAMIN Virginie. Dans les yeux d’Henriette. (2002). Paris : Casterman, (coll. « Les albums Duculot »). Un album sur la vieillesse, la mort, le souvenir et la transmission. Il raconte la rencontre poétique d’Henriette, vieille dame solitaire de 118 ans, et d’Armand, petit garçon partageant le même sentiment de solitude. Au fur et à mesure qu’Henriette conte à Armand des histoires sur le monde et l’existence, la vieille dame rapetisse et le petit garçon grandit. Jusqu’à ce qu’Henriette, devenue encore plus petite qu’une fourmi, disparaisse complètement (le mot
« mort » n’apparait jamais dans le texte) et laisse à Armand le soin de continuer à raconter ses histoires à d’autres enfants. La mort n’est pas (est moins) un scandale quand elle intervient au terme d’un cheminement abouti et accompli et que l’on continue à exister dans le souvenir de ceux qui nous ont aimés.

l’ordre de la compréhension). Donc, le récit nous signifie que la mort n’est pas toujours un événement tragique si nous avons pu, comme Henriette, accomplir pleinement notre existence. Nous voilà donc amenés sur le terrain d’une réflexion abstraite d’ordre philosophique. Voici quelques réflexions justement d’élèves où l’on observe ce passage entre l’interprétation du texte et des généralisations d’ordre métaphysiques sur la question de la mort :
- Amélie : « Henriette, elle pense pas à la mort. Elle profite de sa vie…. Mais quand même c’est triste la mort parce que… bon, pour toi c’est pas triste mais pour les autres, pour ceux qui te connaissent. C’est pour les autres que c’est dur.» On remarquera la veine épicurienne de cette remarque : Il ne faut pas avoir de la peur car pour soi elle n’est rien. Quand nous vivons, elle n’est pas là et quand elle est là, nous ne sommes plus là pour la craindre… La mort est donc d’abord une souffrance pour ceux qui restent. Et puis comme le souligne un autre élève :
- Timothée : « Henriette continue de toute façon à exister dans le cœur, dans le souvenir, de celui qui l’a aimée ». Ainsi, les élèves concluront le débat par cette idée : « Garder le souvenir de la personne qu’on a aimée rend la mort moins dure. » Ces élèves de cycle 3 ont bien abouti à une lecture de type philosophique du texte littéraire et ont pu développer, à partir de l’implicite du texte, des réflexions conceptuelles générales sur la problématique de la mort et du souvenir.
- Soit, et c‘est là une autre façon d’observer le lien entre débat interprétatif et débat réflexif, l’interprétation que donne les élèves est sous-tendue par des implicites philosophiques qu’il revient alors d’élucider. Par exemple pour Yakouba de T. Dedieu10: quand un enfant affirme qu’à la place du héros, il ne tuerait pas le lion parce que ce n’est qu’en épargnant l’animal qu’il deviendra un homme, le choix axiologique de l’élève est sous-tendu par une certaine définition a priori et non explicitée des concepts de Devoir, de Dignité, de Courage et d’Humanité. C’est alors à l’enseignant, par un questionnement spécifique, de permettre l’élucidation de ces présupposés philosophiques. Car c’est bien son rôle de permettre aux élèves de s’engager dans ces différentes postures d’appropriation du texte, dans toute sa richesse, et d’enclencher des réflexions sur les concepts qui y sont à l’œuvre.11
Mais même si les frontières entre philosophie et littérature sont difficiles à délimiter, il est cependant nécessaire de bien distinguer l’approche littéraire et l’approche philosophique : la première se fonde à la fois sur un travail de la langue, du style, en tant qu’il produit des effets et sur la pluralité des


10DEDIEU Thierry (2004). Yakouba. Paris : Seuil Jeunesse. L’album représente un antique dilemme moral : pour intégrer la tribu des guerriers, faut-il que le jeune Yakouba tue le lion blessé ou qu’il lui laisse la vie sauve ? Par quel geste Yakouba va-t-il devenir un homme ? Les programmes de littérature encouragent à l’exploitation philosophique de ce texte : “ On fera découvrir l’album aux élèves jusqu’à l’alternative qui se pose au héros et on organisera un débat sur le parti à prendre dans des circonstances analogues. Débat qui rebondira quand les élèves découvriront la fin implicite : le village tire bénéfice du choix de Yakouba, mais personne ne le sait, sauf lui.” 10 (Documents d’accompagnement des programmes. Littérature cycle3. p.12)
11 Voir sur le passage d’une lecture littéraire à une lecture philosophique d’une même œuvre : CHIROUTER Edwige. « L’enfant, la littérature et la philosophie. De la lecture littéraire à la lecture philosophique de la même œuvre ». (2008) Penser l’éducation. Philosophie de l’éducation et histoire des idées pédagogiques. N° 24, p. 43-63
interprétations possibles. Elle s’intéresse d’abord au texte, à sa structure, à son inscription dans une histoire, dans un genre, à ses significations et à ses effets esthétiques mais aussi éthiques et métaphysiques. La pensée du texte est indissociable de l’expérience d’écriture et de la forme à travers laquelle l’écrivain a choisi de la livrer au lecteur. C’est la construction de cette approche spécifique du texte, et la mise en perspective avec d’autres œuvres, que vise, en priorité, l’enseignement de la littérature à l’école.
L’approche philosophique est autrement spécifique et donne un éclairage du texte qui est nécessaire pour permettre au lecteur non seulement de s’approprier l’œuvre dans toute sa richesse mais pour surtout en saisir sa finalité ultime. Une œuvre n’existe pas essentiellement pour s’inscrire dans l’histoire d’un genre, ni même pour modifier le rapport à la langue (une expérience purement formelle ou technique serait finalement vaine), mais elle existe parce que l’auteur, à travers la métaphore fictionnelle, nous livre une parole sur le monde. L’approche philosophique du texte est non seulement complémentaire de l’approche strictement littéraire mais elle est absolument nécessaire pour mettre en lumière la raison d’être profonde du récit. C’est ce qu’énonce clairement T. Todorov dans son plaidoyer pour un enseignement de la littérature qui non seulement n’oublie pas mais met en avant le sens et les finalités heuristiques et initiatiques des œuvres :
« La connaissance de la littérature n’est pas une fin en soi, mais une des voies royales conduisant à l’accomplissement de chacun. Le chemin dans lequel est engagé aujourd’hui l’enseignement littéraire, qui tourne le dos à cet horizon (« cette semaine on a étudié la métonymie, la semaine prochaine on passe à la personnification »), risque, lui, de nous conduire dans une impasse – sans parler de ce qu’il pourra difficilement aboutir à un amour de la littérature. »12
Et la complémentarité des deux approches est réciproque. Il ne doit donc pas y avoir de hiérarchie ou de rapports de subordination entre ces deux disciplines. Si l’enseignement de la littérature nécessite cette approche philosophique, l’enseignement de la philosophie nécessite aussi ce recours à la sensibilité et à la bonne distance du texte littéraire pour redonner de l’âme et de la vivacité à son discours. La philosophie a aussi comme finalité ultime de bouleverser le sujet et de l’aider à vivre. Dans ce cadre, l’approche philosophique se nourrit du texte littéraire, le respecte profondément en préservant son irréductibilité et la pluralité de ses significations, mais pour ensuite prendre ses distances et se situer finalement sur le terrain abstrait des concepts. Elle vise à dépasser les particularités des expériences singulières et les ambiguïtés du langage pour tendre vers un certain rapport à la vérité, à l’objectivité et l’universalité.

Analyse du corpus : trois années d’atelier de philosophie en cycle 3
Nous avons pu être accueillis pendant trois années à l’école élémentaire de Coulans-sur-Gee (Sarthe) pour mener tous les samedis matin des séances de philosophie à partir de la mise en réseau d’albums sur la notion traitée. L’école de Coulans est une école semi-rurale qui accueille des enfants de milieux sociaux très

12 TODOROV Tzvetan (2007). La littérature en péril. Paris : Flammarion, (coll. «Café Voltaire»), p. 25
hétérogènes. C’est donc un professeur de philosophie qui a suivi les élèves tout au long de leur cycle 3. Toutes les séances ont été filmées, retranscrites et constituent ainsi notre corpus.
L’analyse de ces scripts nous a confirmé l’hypothèse que des élèves entre 8 et 11 ans sont capables, si le dispositif et l’étayage de l’enseignant le permettent, de construire une posture réflexive par rapport au texte littéraire et de commencer par là à apprendre à penser de façon rigoureuse.
Deux grandes conclusions peuvent être tirées de l’analyse du corpus :
1) Il existe bien un lien inextricable entre littérature et philosophie et ce lien s’observe particulièrement bien dans l’impossibilité de déterminer des frontières strictes entre « débat interprétatif » et « débat réflexif ». Et plus le texte est riche dans sa littérarité, plus il contient d’implicite, plus la réflexion philosophique des élèves peut être profonde.
2) L’appel fait aux textes littéraires garantit la rigueur philosophique des échanges : La Littérature facilite chez les élèves la construction d’une pensée de type philosophique, car elle permet effectivement :
- L’investissement du sujet dans la réflexion (l’identification aux personnages permet cette « nécessité intérieure » inhérente à tout engagement authentique dans la pensée) ;
- L’argumentation (grâce sa « fonction référentielle » qui semble évidente chez les enfants tant leur rapport à la fiction et à l’imaginaire est constitutif de leur condition) ;
- La problématisation (par le dispositif de mise en réseau et le rôle de contre- exemple que peut jouer le texte) ;
- La conceptualisation (quand la fiction pense et illustre certains attributs du concept travaillé)
- En ce sens, la « bonne distance » qu’instaure la littérature entre l’expérience personnelle et le concept permet bien à de jeunes sujets de s’engager dans la difficile et périlleuse aventure de la pensée.
Première leçon: Le lien inextricable entre « débat interprétatif » et « débat réflexif »
Dans aucun des scripts analysés, on ne peut observer de chronologie rigoureuse où les enfants débattraient d’abord sur l’implicite du texte puis développerait ensuite une réflexion de type philosophique. Et cela même dans un dispositif où cette chronologie est pensée comme telle dans la préparation de la séquence. La réflexion sur les implicites du texte permet dans un même mouvement de réfléchir sur ses enjeux philosophiques et d’en tirer des idées générales. Bien sûr, les consignes du maître et la nature de son questionnement induisent des postures plus spécifiques chez l’élève mais c’est aussi par son essence même que la métaphore fictionnelle engage le lecteur sur le terrain d’interrogations existentielles et métaphysiques.
Nous voyons bien dans les scripts que plus le texte est riche, plus il contient d’implicites, de blancs et de mystères, plus les enjeux éthiques qu’il soulève sont subtils et complexes, plus les discussions philosophiques vont être riches et profondes. Nous avons pu l’observer dans les séances portant justement sur des albums très métaphoriques, comme Dans les yeux d’Henriette de V. Jamin, Moi et rien de K. Crowther, ou Yakouba de T. Dedieu. Le discours de P. Ricœur sur la pensée de la littérature (en général) s’applique bien à certaines œuvres de littérature de jeunesse. Leur richesse, leur subtilité, leur beauté et leur intelligence initient les jeunes lecteurs à une première aventure dans le laboratoire de l’imaginaire et de la pensée. La métaphore littéraire, par sa nature même de discours sur l’existence et le monde, amène le lecteur dans une expérience de pensée – qui, si elle est, surtout pour les plus jeunes, bien guidée par le maître, peut devenir un véritable apprentissage du philosopher.
Dans ces scripts, ce sont donc essentiellement des débats sur les blancs et les implicites des œuvres qui ont permis à des réflexions de type philosophique de s’engager. Dans une séance à partir de l’album de V. Jamin, le mystère de la
« disparition » d’Henriette va entraîner la communauté de recherche vers des réflexions sur le sens de la mort et l’accomplissement d’une vie réussie. C’est en essayant de comprendre l’absence de tristesse d’Armand (malgré la « disparition » de son amie) que Quentin va dégager l’idée que le souvenir que nous pouvons entretenir des êtres aimés disparus atténue le tragique de la mort :


123 Quentin Je sais pourquoi il est pas trop triste parce Interprétation
qu’elle… elle lui a raconté plein d’histoires et comprenant une idée
que ça lui a plu… Et puis, ben, euh, il a philosophique. Idée
trouvé une nouvelle amie et puis… d’accomplissement
maintenant après il pense plus… il pense à
elle.


Cette idée fondamentale et universelle de l’importance de la transmission et du souvenir est ainsi exprimée grâce au travail de réflexion sur un des blancs du texte.
Mais ce rapport réflexif à la littérature se construit : lors des toutes premières séances en CE2 à l’école de Coulans-sur-Gée, les élèves ne pensaient pas avec les albums mais sous leur contrôle. Ils avaient une culture de la « bonne réponse » et lisaient les textes comme des documentaires ou des dictionnaires pour y trouver, écrit noir sur blanc, ce qu’il faut dire au professeur. C’est donc tout un travail sur la nature même ce qu’est une œuvre littéraire et en quoi consiste une interprétation qu’il a fallu construire chez ces élèves. Ils ne citaient pas non plus spontanément les albums pour réfléchir. Mais un an plus tard, les élèves ont déjà considérablement changé leur relation à la littérature. Ils commencent à acquérir certains habitus, comme le montre l’intervention de Chloé qui dégage spontanément les leçons philosophiques d’un album de C. Ponti pour répondre à la question posée :

188 Chloé C’est sa grand-mère qui continue à vivre grâce Interprétation
aux histoires… Hippolène devient une adulte. comprenant une idée
Elle grandit grâce aux histoires. Elle n’est plus philosophique. L’être
triste. La mort est devenue moins triste. Grâce aimé disparu continue
aux histoires, elle vit toujours aussi. d’exister grâce au
souvenir

Chloé a compris quelle posture adopter lors de ces séances. Elle se saisit du texte, non pour donner un avis esthétique sur sa valeur, ni pour répondre à des questions d’analyse strictement littéraire (comme celle du genre auquel il appartient), mais bien pour spécifier ce qu’il nous dit sur la question posée (ici sur le travail de deuil et l’importance du souvenir). Il s’agit bien de dégager le discours du texte et sa portée philosophique, il s’agit de faire appel à lui pour nous guider dans notre cheminement intellectuel.
Nous avons pu également observer qu’une réflexion philosophique entamée par la communauté de recherche peut amener aussi les élèves à mieux comprendre le récit. Si le débat interprétatif entraîne donc souvent une réflexion d’ordre philosophique sur des notions abstraites, le travail de conceptualisation peut, en retour, alimenter et bouleverser l’interprétation du lecteur. On assiste alors à un aller-retour entre débat interprétatif et débat réflexif. L’examen des notions peut, par exemple, amener les élèves à ré-envisager les relations entre les personnages. C’est le cas notamment dans l’intervention de Quentin à propos de l’album Marcel et Hugo d’A. Browne :


155 Quentin Ben aussi dans Marcel et Hugo. C’est, euh, Hugo qui cogne dans Marcel et après il est désolé et après ils deviennent amis. Référence spontanée à un des albums du réseau. Application de la distinction notionnelle à l’interprétation du récit.


Quentin s’approprie la distinction notionnelle entre “ ami ” et “ copain ”, qui vient d’être pensée par la communauté de recherche, pour reconsidérer sa lecture de l’album. C’est le débat réflexif sur la différence entre les notions de camaraderie et d’amitié qui permet une nouvelle interprétation du texte. La réflexion sur ces notions permet une meilleure compréhension de la nature des relations entre les personnages. La réflexion philosophique offre de nouvelles grilles de lecture du récit et de ses enjeux. C’est le débat réflexif qui ici aide au débat interprétatif.
Deuxième leçon : les références littéraires aident à maintenir les exigences de pensée.
Par la « bonne distance » qu’elle instaure entre l’expérience singulière et l’abstraction pure, la fiction permet bien à de jeunes sujets de s’engager dans une pensée réflexive rigoureuse.


- L’identification aux personnages permet l’investissement des élèves dans la réflexion. Quand la rencontre, toujours aléatoire, a lieu, l’identification permet de s’approprier la problématique philosophique. Elle permet d’en saisir intimement les enjeux. La littérature permet alors aux élèves d’éprouver cette « nécessité intérieure » inhérente à toute réflexion philosophique véritable. Dans un dispositif où l’on ne travaille que sur un seul album, comme dans les séances sur Yakouba, ce processus d’identification est sûrement bien plus fort chez l’ensemble des élèves que dans mon dispositif de mise en réseau. Mais, dans chaque cas, il doit être dépassé pour aller vers une réflexion exigeante et rigoureuse.


- Parce qu’elle a une valeur d’exemplarité, la littérature aide aussi à l’argumentation.
Les enfants n’ont aucune difficulté avec cette valeur d’exemplarité de la littérature. Et s’ils saisissent pleinement la force de cette fonction référentielle c’est sûrement parce que, comme l’affirme Vincent Jouve, il existe une corrélation intime et profonde entre le monde de l’enfance et les mondes de la fiction et l’imaginaire.


Ainsi les élèves peuvent s’appuyer sur des références littéraires par argumenter. Florian, par exemple, s’aide de la figure de Peter Pan pour réfuter l’idée que « c’est toujours bien de grandir » :


92 Florian Y en aussi qui veulent pas grandir. Parce Recours spontané à
que…Comme Peter Pan, il veut pas grandir. une référence
Y en a qui veulent pas grandir parce qu’ils littéraire pour
disent qu’on prend trop de responsabilités illustrer l’idée de
quand on est grand. difficulté psychique
de grandir.


Cette représentation universelle de la peur de grandir lui permet de contre argumenter dans la discussion. Elle a valeur d’objection. Le caractère imaginaire de l’exemple ne donne pas moins de valeur à l’idée énoncée. La référence à cette figure mythique emblématique, qui incarne un désir constitutif de la condition humaine universelle, a valeur de vérité. Les réflexions de P. Ricœur ou de J. Bruner sur la littérature comme expérience de vérité trouvent un écho remarquable dans la façon dont les élèves s’appuient sur les références littéraires pour étayer leur réflexion avec justesse et cohérence.


- Par le dispositif de mise en réseau et le rôle de contre-exemple, les références littéraires aident aussi à la problématisation.


La mise en réseau sur des œuvres qui abordent sous des angles différents la notion permet d’introduire de la complexité et facilite certainement la problématisation du questionnement. Pour le maître, dont le rôle est de se faire parfois l’avocat du diable pour restituer la subtilité et les difficultés de la problématique, les références littéraires permettent de relancer la discussion, en se maintenant lui-même à distance. Il ne donne pas son avis, ne parle pas de son expérience personnelle, mais pointe simplement grâce au texte une contradiction qui va soulever tous les enjeux philosophiques de la question posée. Voici un exemple, tiré d’une séance sur « grandir », où le professeur de philosophie (M) souligne la transgression du personnage (transgression qui va lui permettre de s’émanciper et de devenir adulte) :


12 M Mais il a désobéi à sa maman ? Problématisation. Introduction de complexité
Par cette question, qui est un contre argument sous forme de question, il essaye de faire comprendre aux élèves les enjeux de leur affirmation : “ si tu es d’accord avec ce que fait Laurent, comme tu viens de nous le dire, alors il faut assumer l’idée que la désobéissance est nécessaire pour grandir ”. La transgression est-elle nécessaire pour grandir et devenir soi-même ? De quelle forme de transgression parle-t-on ? Peut-on en déterminer les critères de légitimité ? Y a t il de bonnes et de mauvaises transgressions nécessaires ?


- La fiction, parce qu’elle pense et illustre certains attributs du concept, permet d’amorcer chez de jeunes enfants un travail de conceptualisation.


Nous avons pu observer un certain nombre de fois dans ces différents scripts que le travail sur l’implicite du texte permet aux élèves d’émettre des idées générales. C’est particulièrement visible dans la séance sur « Grandir ». Valentin, par exemple dès le début de la séance, fait appel à l’album d’A. Vaugelade en pour déduire spontanément une définition générale :

3 Valentin Ben, en fait dans Laurent tout seul, euh, au Posture littéraire : résumé
début, il était, euh, dans la cuisine. Et puis d’un épisode du récit
et après, euh, il a pas écouté sa maman. Il suivie immédiatement
a dépassé la barrière et le châtaignier, et d’une posture réflexive
après, il a fait un long voyage. Et moi, je par généralisation et
pense que être grand on peut prendre ses attribut du concept.
responsabilités. Réactions ontologiques

Son raisonnement part de l’exemple fictionnel pour déterminer un attribut du concept (être grand, c’est être responsable). Il part du cas de Laurent,
personnage fictif, pour parvenir à l’emploi du “ on ” qui marque bien ici un effort de conceptualisation.
Inès, dans la même séance, va elle aussi user explicitement de la métaphore pour développer son point de vue et généraliser :


184 Ines Laurent aussi, il y a l’exemple de sortir Retour au texte. Pensée par
de la maison parce que si on reste à la rhizome. Retour de la
maison, on va jamais découvrir. Il va question de la transgression.
jamais découvrir le monde Recours à la métaphore
pour généraliser


Elle s’approprie la métaphore du récit (“ Sortir de la maison ” = découvrir et découvrir c’est grandir.) et entremêle ainsi intimement dans sa phrase la référence au personnage (« Laurent », « il ») et la généralisation (« on »).


Au cours du CM2, les élèves font de plus en plus régulièrement preuve de cette capacité à conceptualiser à partir de la portée philosophique d’un texte. Par exemple, lors des séances sur l’Art et le Beau, ils vont, à plusieurs reprises, faire spontanément appel aux albums du réseau pour définir les notions :


7 Eloïse Oui et même si… même si on dessine mal, Réaction ontologique.
c’est des œuvres quand même. Résumé de la leçon
philosophique d’un album et
généralisation. Idée : l’art ne
se limite pas à l’imitation
parfaite de la réalité.


Eloïse prend ici appuie sur l’album de M. Piquemal, Le manège de petit Pierre (sur l’art brut), pour énoncer l’idée que l’art ne se limite pas à une imitation, même techniquement parfaite, de la réalité. Cette remarque conduira la communauté de recherche à émettre l’idée que c’est surtout dans la démarche, plus encore que dans le résultat, que résulte l’essence d’une authentique œuvre d’art.
C’est aussi ce même type de posture réflexive qu’adopte par exemple Victor dans une séance sur Yakouba :


25 Victor S’il ne le tue pas il sera grand dans sa tête. Réaction ontologique (pensée du texte)


Victor justifie ici le choix de Yakouba (ne pas tuer le lion) et cette justification se fonde sur une certaine définition de la responsabilité et du devoir :


ce n’est qu’en épargnant l’animal blessé que Yakouba sera « grand », car c’est dans cet acte de compassion que s’accomplira sa dignité et son vrai courage.
Dans ces séances, on observe donc bien chez les élèves ce que nous avons appelé des « réactions ontologiques » : ils partent de l’interprétation de ce qu’ils pensent être une des « leçons » du texte pour énoncer une idée philosophique générale. S’appuyant sur un « exemple exemplaire », qui a valeur d’universalité, leur réflexion acquiert par là une véritable rigueur.

- Enfin, la « bonne distance » qu’instaure la littérature, entre l’expérience personnelle et le concept, permet de faire le pont entre le trop général et l’intime. Elle permet cet aller retour fécond entre la fiction, le général et la réalité. Elle donne ainsi un sens profond à la réflexion philosophique. La littérature permet alors de donner corps à un exercice intellectuel encore perçu trop généralement comme impersonnel et déconnecté des vraies préoccupations humaines.

On le voit particulièrement bien dans la séance à partir de l’album Moi et Rien de K. Crowther (CM1). Sûrement parce que le thème abordé, la mort, nécessite plus que tout autre cette mise à distance. Une intervention est particulièrement significative : celle où Eloïse va allier le débat interprétatif sur la signification du personnage (« Rien » qui est l’ami imaginaire que se construit la petite fille au début de l’album pour surmonter le deuil de sa mère), une réflexion
plus générale sur l’importance du souvenir dans le travail de deuil et l’application de cette leçon à son expérience personnelle:

28 Eloïse La mort dès fois on peut revivre dans le cœur des autres parce que Rien… Rien c’est peut- être le souvenir de sa maman. Elle imagine
… comme moi mon hamster. C’est tellement triste alors des fois j’imagine qu’il est là. Généralisation par le recours à l’interprétation du texte. Réaction ontologique. Activation fantasmatique.

L’interprétation du texte, la généralisation et l’application à la vie personnelle sont ordonnées avec justesse dans cette seule intervention. Ici ce que nous avons appelé la « bonne distance » de la littérature permet effectivement au sujet de s’engager sur le terrain risqué d’une réflexion sur le tragique de la condition humaine. Comme le dit P. Meirieu, dans Des enfants et des hommes, « tel est bien le mérite du récit littéraire : il ne dit pas tout et, en ses interstices et ses ambiguïtés, il autorise le lecteur à parler de lui, voire à évoquer pudiquement la part la plus secrète de lui-même. Mais il en dit toutefois suffisamment pour résister à la capture totale par notre imaginaire et nous relie ainsi à d’autres humains, en un mouvement d’objectivation qui esquisse déjà une forme d’universalité. (…) Il nous permet de parler de
nous sans nous enfermer en nous-mêmes. Il est ainsi au cœur de la dialectique de l’identité
et de l’altérité qui constitue le processus fondamental de notre construction personnelle et professionnelle. ». 13
Nous n’affirmons pas que la pratique de la philosophie avec les enfants n’est possible qu’en prenant appui sur des supports littéraires - il existe d’autres dispositifs intéressants qui partent essentiellement de l’expérience personnelle des élèves, de l’actualité ou d‘autres supports culturels - mais la littérature, par sa nature réflexive et son caractère universel, facilite avec sensibilité et beauté l’apprentissage de la pensée critique. Elle permet de réconcilier le sensible et le rationnel. Elle donne sens aux problématiques tout en permettant la rigueur de penser. Elle permet de donner vie, corps et âme à la réflexion philosophique.
Mais pour que les élèves s’approprient pleinement cette dimension réflexive de la littérature, il faut qu’ils soient guidés par un étaye rigoureux et bienveillant de l’enseignant (étayage que nous n’avons pas le temps de décrire précisément ici). Même si les frontières entre l’instrumentalisation et le respect du texte sont très fragiles - comme le sont les frontières entre un guidage de l’enseignant qui serait respectueux de la liberté de l’enfant et un guidage qui serait trop directif - cette vigilance et cette attention bienveillante à l’égard du texte ne
peuvent s’acquérir que si l’on a fait soi-même cette expérience de la rencontre littéraire, et si l’on est bien conscient de tous les enjeux justement de ce travail philosophique à partir de la littérature. Il faut donc avoir soi-même réfléchi aux liens complexes qui unissent ces deux disciplines pour pouvoir être lucide.
Dans et par ces séances, les élèves auront pu à la fois renforcer leur rapport à la littérature (par la rencontre avec un beau texte, je peux mieux me comprendre et comprendre le monde) – et initier une première relation à la philosophie (je peux dès maintenant m’emparer de ces grandes questions et commencer à réfléchir pour donner sens à mon existence). Et les élèves ont pu acquérir cette posture réflexive à la fois par la force intrinsèque des œuvres elles-mêmes mais aussi par la nature des dispositifs et des interventions de l’adulte. Il nous faut donc souligner l’importance du choix des albums, de la fréquence des ateliers, et de la formation des maîtres. Ainsi, lors de toutes ces séances, à des degrés divers bien sûr, l’imaginaire a donc bien été pour ces élèves un immense laboratoire où ils ont pu commencer à penser leur condition humaine et leur rapport aux autres et au monde.


En conclusion
Notre recherche souligne le lien entre philosophie (avec les enfants) et littérature (de jeunesse) et démontre qu’il est possible de transposer le discours que tenait Paul Ricœur sur la littérature en général à la littérature dite « de jeunesse », et qu’ainsi un enseignement de la philosophie est possible, et nécessaire. La « philosophie avec les enfants » est une des voies nécessaires pour gagner l’enjeu de la démocratisation de l’enseignement de cette discipline. L’école doit montrer aux élèves que la philosophie, comme le prêchait Montaigne, n’est

13 MEIRIEU P. (1999). Des enfants et des hommes, littérature et pédagogie 1, la promesse de grandir, Paris, ESF, p. 16.


pas seulement une discipline scolaire mais qu’elle est aussi et surtout une invitation à donner sens à son existence. Saisissons la curiosité spontanée des enfants pour ces questions métaphysiques et surtout donnons-leur les outils culturels et intellectuels qui leur permettront de construire une pensée rationnelle et rigoureuse. Il ne s’agit de remettre en cause ni l’exercice de la dissertation ou du commentaire de texte mais, bien au contraire, de donner à tous les élèves la possibilité de répondre à ces exigences. Il s’agit de donner les moyens à une véritable démocratisation de l’enseignement de la philosophie, non en nivelant par le bas, mais en donnant à tous le temps et les moyens de parvenir à cette rigueur de pensée.
La démocratisation de l’enseignement de la philosophie est une nécessité dans le monde aujourd’hui, caractérisé par la complexité et les crises multiples (des valeurs, de la démocratie, de l'économie). Nous rejoignons ainsi les préoccupations de la philosophe Martha Nussbaum dans son livre, Les émotions démocratiques (2011) - dont un des chapitres est justement consacré à la philosophie avec les enfants. Pour M. Nussbaum, le système éducatif mondial tend à mettre de coté les Humanités au profit d’une connaissance purement technologique,
préparant ainsi une grave crise de la démocratie. Pourtant, seuls la littérature, la philosophie, l’histoire et les arts permettent aux futurs citoyens de développer leur faculté critique et leur empathie.


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Received in: 27/10/2015 Accepted in: 19/11/2015
 IntroducciónLa práctica de la "filosofía con los niños" se está desarrollando en Francia durante los últimos treinta años. Desde los Estados Unidos, a raíz de la obra del filósofo y experimentos Sr. Lipman, el "DVP" 2 adoptar diversas formas, responder a las cuestiones y plural despertar mucha controversia. ¿Cómo estas prácticas con estudiantes tan jóvenes pueden ser verdaderamente filosófica? ¿Qué características? ¿Qué medios de comunicación? ¿Qué requisitos? ¿Qué formación para los profesores? Así, este artículo reproduce las principales conclusiones de una investigación llevada a cabo en tres años consecutivos en la filosofía con los niños y las implicaciones filosóficas de la literatura de jeunesse.3 Esta investigación se basa en la siguiente hipótesis: no se puede aprender a filosofar sin transportistas, sin textos, que permiten el distanciamiento y la problemática de la materia. Los textos de filosofía clásicos son demasiado difícil y compleja para los estudiantes de primaria es a través de la literatura que se les permita entrar en la reflexividad. Y es también quizás gracias a la infancia como la literatura y la filosofía podría recuperar su alianza original. La infancia es el puente que recuperaría la hermandad de estas dos palabras, que ciertamente no confundirse, pero es importante no olvidar la base común: la literatura y la filosofía son tanto el inteligibilidad del habla y que dan sentido a nuestra existencia. Nacen de asombro ante el mundo, la experiencia cuya infancia nos recuerda la fuerza diaria fundador, y buscan tanto para iluminar nuestra condición. Disciplinas demasiado a menudo e injustamente dividen en los sistemas de educación, la literatura y la filosofía, es posible que no recupere su complementariedad con el desarrollo de la filosofía con los niños?Desde un punto de vista metodológico, hemos seguido durante tres años los mismos estudiantes en una sesión de un taller filosófico por semana, las sesiones llevadas a cabo por un profesor de filosofía (yo mismo) y siguiendo siempre el mismo dispositivo reproducción de la red de álbumes en cuestiones filosóficas tratadas. Todas las sesiones fueron grabadas, transcritas y analizadas utilizando una parrilla de análisis que se utilizó para medir tanto el desarrollo de habilidades específicamente filosóficas estos estudiantes (discutir, conceptualizar, problematizar) y, sobre todo, para mostrar cómo permitió la literatura estudiantes muy jóvenes para empezar a aprender este complejo. El análisis de este corpus se ha demostrado que los estudiantes de entre 8 y 11 años son capaces, si el dispositivo y el apuntalamiento permiten a los maestros para construir una lectura específicamente filosófico. Estudiantes de las escuelas primarias están bien

2 "Hable con filosóficamente", un término comúnmente utilizado para describir la práctica de la filosofía con los niños.3 Chirouter Edwige. (2008). "Lo que piensa la literatura infantil? Significado filosófico dela literatura y las prácticas filosóficas menores de ciclo 3 de la escuela primaria ". Ciencias de la Educación de Doctorado. Dirección Sr. Tozzi. U. Montpellier IIII. 485 p.

capaz de captar la idea de una historia para construir su propio pensamiento en un concepto (como la felicidad, la libertad, el amor, la amistad).

La profunda alianza de la infancia, la literatura y la filosofíaDebido a la infancia íntimamente funciona a la manera de pensamiento mágico, es la edad de oro de esta facultad exclusivamente humana de sumergirse en cuerpo y alma en el universo de ficción. Este genio de abandono en la imaginación también se refleja en el juego de imitación y el papel. Este es el encanto de la ficción que por cierto también podría ser el blanco de los filósofos (como Platón o Rousseau). Su poder de seducción y la influencia es tal que puede ser una ilusión peligrosa que halaga las pasiones e impulsos. "Este consentimiento eufórico a la ficción", 4 ya que es constitutiva de la condición humana, que nunca desaparece por completo. Nos encontramos, casi intacta, cada vez que (re) hacer que la experiencia iniciática del encuentro literario, cada vez que se toman en y por una narración. Cada intensa lectura, es el niño que despierta en nosotros. Como escribe bellamente Vicente Jouve, "la lectura es ante todo un contraste de la infancia. "5Infancia, la literatura y la filosofía luego unirse a la misma preocupación para captar, entender y saber. Para esta inmersión de estar en el mundo de la ficción no sólo responde a un deseo de escapar de la realidad. En cambio, al igual que los adultos, el niño también buscan las historias de respuestas a preguntas fundamentales. Se escapó y abandonó la esperanza seria de encontrar significado. La lectura es una búsqueda para buscar uno mismo y los demás. Al rehabilitar fábulas valor educativo y de reflexión, sin embargo, a menudo se equipara con tanta moralina edificante, Fabre resume claramente esta dimensión heurística de la literatura: "En el trabajo sobre uno mismo que se requiere:distanciándose reelaboración de las identificaciones, la superación del egoísmo; la frecuencia polémico enfrentamiento entre los valores de la unidad y los valores del texto; por la difícil distinción entre la lectura y la comprensión crítica es un proceso que implica a toda la personalidad. La comprensión del texto es, al mismo tiempo intentar, a través de él, de entender. "6Filosofía y literatura nos ofrecen pensamientos en vivo sobre los desafíos de la condición humana y los valores de la cultura. Actúan y cuestionan las representaciones que tenemos de nosotros mismos y del mundo. Como se destaca por Ricoeur en su obra, al igual discurso como filosófico, más conceptual y racional, la cuenta también nos permite examinar y penser7. Y para el niño, cuya capacidad de abstracción se está desarrollando, las historias juegan un papel necesario de la mediación que da forma a los problemas éticos o existenciales. También permiten experimentar con los mundos posibles. De este modo, introducir temas

4 JOUVE Vicente. (1993). La lectura. Paris: Hachette, p (al "Contornos literaria."). 865 JOUVE Vicente. (1993). La lectura. Op.cit,. P. 876 Michel Fabre. (1989). El niño y fábulas. París: PUF, p (al "hoy Pedagogía".). 2347 Paul Ricoeur (1975). Vivir metáfora. París: Seuilen una "distancia de seguridad" de lo real y de esta manera ofrecer un acceso real a las reflexiones filosóficas.No hay obra literaria real que no es también una reflexión sobre el mundo y la vida. Según lo escrito por J. Crinon: "La literatura nos dice acerca de nosotros mismos, a nuestros semejantes, el mundo que nos rodea. Hablando del mundo, ella organiza categorías implícitas y es, sin duda, una de sus funciones esenciales. "8 Ya en la escuela primaria, el trabajo en esta dimensión fundamental de las obras puede comenzar al mismo tiempo un El aprendizaje del pensamiento filosófico. En efecto, existe una conjunción necesaria entre las dos disciplinas. Ciertamente, no es formulada explícitamente en los programas, pero para evitar el enfoque técnico a la literatura de enseñanza debe encontrar los fundamentos mismas historias: ¿por qué hay de la literatura? Debido a que los hombres tienen que decirle al mundo y pensar. ¿Por qué necesitamos para contar historias? Para dar forma y sentido a los misterios del mundo, su "extrañas". La literatura tiene la misma lógica que la filosofía: que decir,configurar, entender e informar.En el análisis de secuencias de comandos de discusión sesiones filosóficamente realizado con ciclo 3 estudiantes, se observó en el trabajo esta complementariedad. En sus interacciones, las comunidades de investigación diferente niño han dado vida a esta alianza fundamental de la literatura y la filosofía: la reflexión sobre el texto implícita allanó el camino para el tipo filosófico de pensar en los problemas y pensó que que llevan. Hemos demostrado la dificultad de establecer límites estrictos entre el debate llamado "interpretativo" y el debate llamado "reflexiva". Esto está explorando principalmente obras literariedad, búsqueda y excavación de su complejidad, su"Blancos" y sus misterios, que la reflexión filosófica fue capaz de despertar yganar en el rigor y la profundidad.Hay dos maneras, un poco diferentes, en los que vemos cómo la interpretación del texto literario lleva a un debate filosófico:- De cualquier interpretación hace que es una reflexión general. Para el álbum A los ojos de Enriqueta Virginie Jamin ejemplo 9: Una interpretación de la "desaparición" de la muerte de Henrietta (no explícito en la letra del texto, pero simbolizado). Pero su amigo Armand no es triste, es el mismo "contenido" al final del álbum (hay un elemento objetivo, explícito en el texto, que es

8 CRINON Jacques. (2008) "Una primera cultura literaria." Libros educativos. No. 462, p. [: La literatura infantil, una nueva disciplina escolar tema?] 32-339 JAMIN Virginia. A los ojos de Enriqueta. (2.002). París: Casterman, (coll "Los álbumes Duculot."). Un álbum de la vejez, la muerte, el recuerdo y la transmisión. Narra el encuentro poético Henriette, solitaria anciana de 118 años, y Armand, muchacho compartir el mismo sentimiento de soledad. En cuanto Armand Henriette historias de cuentos sobre el mundo y la vida, la anciana se hace más pequeño y el niño crece. Hasta Harriet, se hizo aún más pequeño que una hormiga, desaparece por completo (la palabra"La muerte" no aparece en el texto) y deja el cuidado Armand seguir contando sus historias a otros niños. La muerte no es (es menor) un escándalo cuando se produce después de un avance exitoso y consumado y que seguimos existiendo en la memoria de aquellos que nos amó.

el orden de la comprensión). Así que la historia nos referimos a que la muerte no siempre es un acontecimiento trágico si pudiéramos, como Henriette, cumplir plenamente nuestra existencia. Por tanto, somos llevados en el suelo de una reflexión filosófica abstracta. Aquí están algunas ideas, precisamente donde los estudiantes observan el paso entre la interpretación del texto y de orden metafísico generalizaciones sobre el tema de la muerte:- Amélie ", Henriette, no pensar en la muerte. Ella disfruta de su vida .... Pero aún así es la muerte triste porque ... bueno, porque no es triste, pero para otros, para los que te conocen. Es por demás es difícil "Tenga en cuenta la vena epicúrea de esta observación. No debería ser ningún temor por sí mismo, ya que no es nada. Cuando vivimos, no está ahí y cuando está ahí, ya no estamos allí para tener miedo ... La muerte es ante todo un sufrimiento para los que se quedan. Y como señaló otro estudiante:- Timoteo, "Henrietta continúa de todas formas de existir en el corazón, en memoria de quien la amaba." Por ejemplo, los estudiantes entran en el debate con esta idea: "Mantener la memoria de la persona que amabas hace la muerte menos duro. "Estos ciclos 3 estudiantes tienen bien dado lugar a un tipo filosófico de la lectura del texto literario y fueron capaces de desarrollar, a partir del texto implícita, reflexiones conceptuales generales sobre el tema de la muerte y el recuerdo.- O, y esta es otra forma de ver la relación entre reflexivo debate interpretativo y discusión, la interpretación dada por los estudiantes se basa en filosófico implicaba que él entonces vuelve a aclarar. Ej Yakouba T. Dedieu10: cuando un niño dice que en lugar del héroe, no sería matar al león porque es sólo por el ahorro que el animal se convierte en un hombre, el axiológico elección el estudiante se basa en una definición a priori of Duty y los conceptos no explicados, dignidad, coraje y humanidad. Fue entonces cuando el profesor, mediante preguntas concretas, que permitan el esclarecimiento de presupuestos filosóficos. Porque es su papel para permitir que los estudiantes se involucren en estos textos apropiación de posturas, en toda su riqueza, e iniciar la reflexión sobre los conceptos que están allí para œuvre.11Pero incluso si las fronteras entre la filosofía y la literatura son difíciles de definir, sin embargo es necesario distinguir entre el enfoque enfoque literario y filosófico: la primera se basa tanto en una lengua de trabajo, el estilo, como produce efectos sobre la pluralidad de

10DEDIEU Thierry (2004). Yakouba. París: Seuil. El álbum es un antiguo dilema moral: integrar la tribu de guerreros, si el joven Yakouba mata al león herido o él lo deja vivir? Yakouba gesto por el cual se convertirá en un hombre? Los programas de literatura fomentan la explotación de este texto filosófico: "Vamos a introducir a los estudiantes a la alternativa álbum que surge héroes y organizar un debate sobre el rumbo a tomar en circunstancias similares. Debate de rebote cuando los estudiantes a descubrir el final implícito: los beneficios de la aldea de la elección de Yakouba, pero nadie conoce sino él "10 (Acompañando programas Literatura Documentos cycle3 p.12 ..).11 Véase en el paso de una lectura literaria en una lectura filosófica de la misma obra: Chirouter Edwige. "El niño, la literatura y la filosofía. De la lectura literaria a la lectura filosófica de la misma obra ". (2008) Pensar la educación. Filosofía de las ideas de educación y enseñanza de la historia. No. 24, p. 43-63posibles interpretaciones. Se ve por primera vez en el texto, la estructura, su inclusión en una historia, en un género, su significado y sus efectos estéticos, sino también ético y metafísico. Texto pensamiento es inseparable de la escritura experiencia y forma a través de la que el escritor ha optado por involucrar al lector. Se trata de la construcción de este enfoque específico del texto, y puesto en perspectiva con otras obras, lo cual es una prioridad, la enseñanza de la literatura en las escuelas.El enfoque filosófico es diferente y da se necesita una iluminación de texto específico no sólo para permitir el trabajo de lector apropiado en toda su riqueza, pero sobre todo comprender su propósito final. Una obra no existe principalmente para inscribirse en la historia de una clase, o incluso para cambiar la relación con el lenguaje (una experiencia puramente formal o técnica sería en última instancia inútil), pero existe porque el autor, a través de la metáfora de ficción nos da una palabra para el mundo. El enfoque filosófico del texto no es sólo complementaria al enfoque estrictamente literario, pero es absolutamente necesario para arrojar luz sobre el motivo de la narrativa profunda. Afirma este Todorov claramente en su defensa para la enseñanza de la literatura, que no sólo no se olvida, pero pone de relieve el significado y propósito de la iniciación y obras heurísticos:"El conocimiento de la literatura no es un fin en sí mismo, pero uno de los caminos reales que conducen a la realización de cada uno. La forma en la que se comprometió hoy la educación literaria, que da la espalda a este horizonte ("Esta semana hemos estudiado la metonimia, la semana que viene nos vamos a la personificación"), arriesgarse, para guiarnos en un callejón sin salida - por no hablar de lo que casi no conducirá a un amor por la literatura. "12Y la complementariedad de los dos enfoques es mutuo. Así que no debería haber ninguna relación de jerarquía o subordinación entre estas dos disciplinas. Si la enseñanza de la literatura requiere que el enfoque filosófico, la enseñanza de la filosofía también requiere el uso de la sensibilidad y buena distancia del texto literario para restaurar el alma y la alegría en su discurso. La filosofía también tiene el propósito último de alterar el sujeto y lo ayude en vivo. En este contexto, el enfoque filosófico alimenta el texto literario, la respetamos profundamente la preservación de su irreductibilidad y la pluralidad de sus significados, pero de ahí a distancia y finalmente situarse en los conceptos abstractos de tierra. Su objetivo es ir más allá de las particularidades de experiencias únicas y ambigüedades del lenguaje de avanzar hacia una relación con la verdad, la objetividad y la universalidad.

Análisis de Corpus: tres años de taller de la filosofía en el ciclo 3Se nos ha acogido durante tres años en primaria Coulans-sur-Gee escolares (Sarthe) para llevar a cabo cada sábado por la mañana sesiones de la filosofía de la puesta en marcha de álbumes en la red concepto cubierto. Los Coulans School es una escuela semi-rural que acoge a los niños de los círculos sociales muy
Tzvetan Todorov 12 (2007). La literatura en peligro de extinción. París: Flammarion, p (al "Café Voltaire".). 25

heterogéneo. Así que es un profesor de filosofía que siguió a los estudiantes de todo su ciclo de 3. Todas las sesiones fueron grabadas en vídeo, transcritas y también lo son nuestro corpus.El análisis de estas secuencias de comandos ha confirmado la hipótesis de que los estudiantes de entre 8 y 11 años son capaces, si el dispositivo y el apuntalamiento permiten a los maestros para construir una postura reflexiva en relación con el texto literario y de inicio con ello aprender a pensar con rigor.Dos de las principales conclusiones se pueden extraer del análisis del corpus:1) Existe un vínculo inextricable entre la literatura y la filosofía y este vínculo es particularmente observado en la imposibilidad de determinar los límites estrictos entre "debate interpretativo" y "debate reflexivo." Y el texto es rico en su literalidad, contiene más implícita, estudiantes reflexión más filosófica pueden ser profundos.2) Un llamamiento hecho a los textos literarios garantiza el rigor de los intercambios filosóficos: La literatura entre los estudiantes facilita la construcción de un tipo filosófico de pensamiento ya que en realidad permite:- Inversión en la reflexión del sujeto (la identificación con los personajes permite que la "necesidad interior" inherente a cada compromiso genuino en el pensamiento);- El argumento (a través de su 'función referencial "que parece evidente en los niños en comparación con su ficción y la imaginación es constitutiva de su condición);- Problematización (por el dispositivo de red y el papel de contraejemplo puede jugar de texto);- Conceptualización (piensan cuando ficción y muestra algunos atributos del concepto trabajadas)- En ese sentido, la literatura qu'instaure "buena distancia" entre la experiencia personal y el concepto permite tanto a sujetos jóvenes a participar en la aventura difícil y peligrosa de pensamiento.Primera lección: El vínculo indisoluble que existe entre el "debate interpretativo" y "debate reflexivo"En ninguno de los scripts analizados, cronología rigurosa se puede observar cuando los niños primero discutirían el texto implícita y luego desarrollar un tipo filosófico de pensamiento. E incluso en un dispositivo en el que esta línea de tiempo se pensó como tal en la preparación de la secuencia. Reflexionando sobre el texto permite implícito en el mismo movimiento para reflexionar sobre temas filosóficos y extraer ideas generales. Por supuesto, las instrucciones del maestro y la naturaleza de su cuestionamiento inducen posturas específicas en los estudiantes, sino también por su propia esencia como la metáfora de ficción involucra al lector en el campo de las preguntas existenciales y metafísicas.Nos vemos en las escrituras que más texto es más rica, contiene implícita, blanco y misterios, más los problemas éticos que plantea son sutiles y complejas, las discusiones filosóficas serán ricos y profundos. Hemos observado en las sesiones sólo en discos muy metafóricos, como los ojos de Henrietta V. Jamin, Me y nada K. Crowther, o Yakouba T. Dedieu. El discurso del pensamiento de Ricoeur sobre la literatura (en general) se aplica a ciertas obras de literatura infantil. Su riqueza, su sutileza, belleza e inteligencia introducen los jóvenes lectores a una primera aventura en el laboratorio de la imaginación y el pensamiento. La metáfora literaria, la naturaleza misma del discurso sobre la existencia y el mundo, lleva al lector en un experimento mental - que, si lo es, especialmente para los jóvenes, aunque guiados por el profesor, puede convertirse en un verdadero aprendizaje filosofar.En estas secuencias de comandos, son esencialmente los debates sobre las obras en blanco y implícitos que han permitido este tipo de reflexiones filosóficas cometer. En una sesión del álbum de V. Jamin, el misterio de"Desaparición" de Henriette conducirá la comunidad de investigadores en reflexiones sobre el significado de la muerte y la finalización de una vida exitosa. Se está tratando de entender la ausencia de tristeza Armand (a pesar de la "desaparición" de su amigo) que Quentin dará a conocer la idea de que la memoria que podamos mantener sus seres queridos disminuye la trágica muerte:

123 Quentin sé por qué él no es demasiado triste porque Interpretaciónella ... ella le contó muchas historias y tener una ideaque le gustaba ... Y luego, bueno, uh, es filosófico. Conceptoencontrado un nuevo amigo y luego ... de logroAhora, después de que él piensa que él piensa más ...ella.

Esta idea fundamental y universal de la importancia de la transmisión y la memoria está bien expresada a través del trabajo de reflexión sobre un texto blanco.Pero esta literatura reflexiva se construye: en las primeras sesiones de la escuela CE2 Coulans-sur-Gee, los estudiantes no creen, pero con los álbumes bajo su control. Tenían una cultura de la "respuesta correcta" y leer los textos como documentales o diccionarios para encontrarlo, en blanco y negro, qué decir a la maestra. Así que fue una obra de la naturaleza lo que es un trabajo literario y lo que una actuación que era necesaria la construcción de estos estudiantes. Ellos no citan espontáneamente Álbumes que pensar. Pero un año más tarde, los estudiantes han cambiado significativamente su relación con la literatura. Comienzan a adquirir ciertos hábitos, como la intervención de Chloe muestra que emerge espontáneamente lecciones filosóficas de un álbum de C. Ponti para responder a la pregunta:



188 Chloe Es su abuela que sigue viviendo Interpretación graciashistorias ... Hippolène se convierte en un adulto. incluyendo una ideaElla creció con las historias. Ya no es filosófico. Sertriste. La muerte se hizo menos triste. Gracias amaba continúa desaparecidalas historias, ella vive todavía. de existir gracias amemoria

Chloe comprendió lo que la postura a adoptar en estas sesiones. Ella entra en texto, no para dar una opinión sobre su valor estético o para responder a las preguntas de un análisis estrictamente literaria (como el género al que pertenece), pero para especificar lo que dice en la materia pedido (aquí en el duelo y la importancia de la memoria). Es así para liberar el discurso del texto y sus implicaciones filosóficas, es recurrir a él para guiarnos en nuestro viaje intelectual.También hemos observado que una reflexión filosófica iniciada por la comunidad de investigación también puede ayudar a los estudiantes a comprender mejor la historia. Si el debate interpretativo tan a menudo conduce a una reflexión filosófica sobre pedido conceptos abstractos, el trabajo de conceptualización puede en la alimentación vuelta y alterar la interpretación del lector. Hay, pues, un viaje de ida y vuelta entre reflexivo debate interpretativo y discusión. La revisión de los conceptos puede, por ejemplo, animar a los estudiantes a volver a considerar las relaciones entre los personajes. Este es el caso especialmente en la intervención de Quentin sobre el álbum y Hugo Marcel A .. Browne:

155 Quentin también en Ben y Hugo Marcel. Esto es, uh, Hugo tropezar con Marcel y después de que lo siente y luego se convierten en amigos. Referencia espontánea a unos discos de red. Aplicación de la distinción teórica a la interpretación de la historia.

Quentin se apropia de la distinción teórica entre "amigo" y "novio", que ha sido considerado por la comunidad científica para que reconsidere su lectura del álbum. Este es el debate reflexivo sobre la diferencia entre las nociones de camaradería y amistad que permite una nueva interpretación del texto. La reflexión sobre estos conceptos permite una mejor comprensión de la naturaleza de las relaciones entre los personajes. La reflexión filosófica ofrece nueva narrativa de las redes de lectura y sus problemas. Este es el debate reflexivo aquí debate ayuda interpretativa.Segunda lección: las referencias literarias ayudan a mantener los requisitos de pensamiento.Por "buena distancia" que establece entre la experiencia singular y la abstracción pura, ficción permite tanto a sujetos jóvenes a participar en el pensamiento reflexivo riguroso.

- Identificación con los personajes permite que la inversión en la reflexión de los estudiantes. Cuando la reunión aún incierto, en su caso, la identificación puede apropiarse de la problemática filosófica. Permite comprender íntimamente los problemas. La literatura y luego permite que los estudiantes experimenten la "necesidad interior" inherente a cualquier reflexión filosófica real. En un dispositivo en el que sólo trabaja en un álbum, al igual que en las sesiones Yakouba Este proceso de identificación es, sin duda mucho más fuerte entre todos los estudiantes de mi dispositivo de red. Pero en cada caso hay que superar para avanzar hacia un pensamiento exigente y riguroso.

- Debido a que tiene un valor de ejemplar, la literatura también ayuda el argumento.Los niños no tienen ningún problema con ese valor ejemplar de la literatura. Y si entienden plenamente la fuerza de esta función referencial que es probablemente debido a que, como se ha dicho Vicente Jouve, hay una relación íntima y profunda entre el mundo de la infancia y el mundo de la ficción y la fantasía .

De esta manera los estudiantes pueden confiar en referencias literarias con el argumento. Florian, por ejemplo, el uso de la figura de Peter Pan para refutar la idea de que "siempre es bueno para crecer"

92 Florian Y tampoco quiere crecer eso. Debido Uso espontáneoAl igual que Peter Pan ... que no va a crecer. referenciaHay algunos que quieren crecer porque para literariadiga usted toma demasiada responsabilidad ilustran la idea decuando uno es grande. dificultad psíquicacrecer.

Esta representación universal del miedo a crecer le permite argumentar en contra de la discusión. Ella valor objeción. El personaje imaginario del ejemplo no da menos valor a la idea expresada. La referencia a esta figura icónica legendaria, que interpreta a un deseo constitutiva de la condición humana universal, un valor de verdad. Las reflexiones de Paul Ricoeur o J. Bruner en la literatura como una verdad de experiencia encontraron un eco notable en la manera como los estudiantes se basan en referencias de la literatura para apoyar su forma de pensar con precisión y consistencia.

- Por ejemplo, la creación de redes de dispositivos y role-contras, referencias literarias también ayudan a problematizar.

Redes en las obras que abordan diferentes ángulos permite introducir el concepto de complejidad y sin duda facilita la problematización de cuestionamiento. Para el profesor, cuyo papel es a veces hacer de abogado del diablo para restaurar la sutileza y la dificultad del problema, las referencias literarias permiten la discusión para reiniciar, permaneciendo en sí de forma remota. No da su opinión, no hablar por experiencia personal, sino simplemente avanzar a través del texto de una contradicción que levantar todas las apuestas filosóficas de la cuestión. He aquí un ejemplo de una sesión sobre "creciente", donde el profesor de filosofía (M) pone de relieve la transgresión del personaje (la transgresión que le permitirá liberarse y convertirse en adulto):

12 M Pero él desobedeció a su madre? Problematización. Presentación de la complejidadMediante esta cuestión, que es un argumento en contra como una pregunta, él trata de hacer que los estudiantes entiendan los riesgos de su declaración: "Si está de acuerdo con lo que Laurent, como usted acaba de decirnos, entonces debe asumir la idea de que es necesaria la desobediencia a crecer ". Es infracción necesita para crecer y llegar a ser uno mismo? ¿Qué forma de transgresión estamos hablando? ¿Podemos determinar los criterios de legitimidad? ¿Hay transgresiones buenos y malos necesario?

- La ficción porque ella piensa y muestra algunos atributos del concepto, para sembrar en los niños pequeños trabajan conceptualización.

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